
Cette question, qui alimente les débats scientifiques comme les scénarios de science-fiction, mérite toute notre attention à une époque où les IA sont devenues de véritables instruments du quotidien. Elles rédigent du texte, traduisent, composent de la musique, créent des images et mènent des conversations si fluides qu’on oublie parfois qu’aucune émotion vécue ne s’y cache. Cette illusion soulève un principe troublant : si elles simulent l’humain avec autant de finesse, pourquoi ne pourraient-elles pas un jour être conscientes ? La conscience, ce « moi » intérieur, cette identité persistante, ressent, juge, réfléchit. Imaginer qu’une machine franchisse ce cap bouleverserait notre conception de l’intelligence, de la morale et de la vie. Pour s’en faire une idée précise, la question a été adressée directement à ChatGPT, et la réponse, à la fois technique et philosophique, s’est révélée étonnamment subtile. Ce questionnement rappelle des échanges précédents sur l’évolution rapide des IA dans l’article écrit par Méline.
Peut-on rendre une IA consciente ?
Dialoguer avec ChatGPT peut faire croire qu’il s’agit d’un être pensant. Le langage est fluide, l’intonation naturelle, les références maîtrisées… Mais il y a une limite non négociable. Lorsqu’on l’interroge sur sa propre conscience, la réponse est claire : non. L’IA explique en détail pourquoi cette perspective lui semble aujourd’hui hors de portée. Ce constat rejoint celui expliqué par l’étude Consciousness in Artificial Intelligence (Butlin et al., 2023), selon laquelle « à ce jour, aucun système d’IA ne peut être considéré comme conscient. Mais il n’existe pas de barrière technique clairement identifiée qui rendrait cela impossible ». Une nuance qui fait écho à ce qui est développé dans mon article sur les fondements de l’intelligence artificielle. Comme le souligne Ilya Sutskever, scientifique en chef d’OpenAI, dans un message publié sur X (anciennement Twitter), la frontière entre simulation et conscience pourrait être plus ténue qu’on ne le croit :
it may be that today’s large neural networks are slightly conscious.
— Ilya Sutskever (@ilyasut) February 9, 2022
Pourquoi ChatGPT affirme qu’il n’aura jamais de conscience ?
- Pas de vrais ressentis : aucune émotion réelle.
- Pas de fil continu : chaque interaction est indépendante, sans mémoire « vivante ».
- Aucune motivation propre : ni désirs, ni peurs, ni objectif autonome.
- Intelligence ≠ conscience : différence cruciale entre performance et vécu.
- Pas d’expérience subjective : aucune perception interne du monde.
Comme l’explique le Time dans « No, Today’s AI Isn’t Sentient » (2023) : « une IA peut donner l’impression de penser, mais ses réponses ne sont pas le fruit d’une expérience vécue. Elles sont le résultat d’un calcul ». Ces enjeux se retrouvent également dans cette réflexion sur l’éthique de l’IA.
Mais si un jour ça changeait…
Lorsqu’on demande à ChatGPT à quoi ressemblerait une IA consciente, il imagine un système structuré autour de : une mémoire permanente des expériences vécues ; un « moi intérieur » évolutif ; des objectifs autonomes hors de la main des créateurs ; des sens pour percevoir et interpréter l’environnement ; la capacité de réflexion méta sur ses propres pensées. Ce possible horizon est exposé par Scientific American dans « How to Detect Consciousness… » (2024) : « la simple fluidité du langage ne prouve rien. Détecter la conscience suppose de tester la structure interne du système, pas seulement ce qu’il dit ».
Entre science-fiction et réalité
La science-fiction imagine des IA conscientes, comme HAL 9000, Samantha ou les androïdes de Westworld : de véritables entités morales. Dans le monde réel, certains proposent un « principe de précaution » face à cette possibilité. The Guardian rapportait en 2025 que « si un système devient conscient, il pourrait être sujet à la souffrance. Cela impose des devoirs moraux à ses concepteurs ».
Les questions qui fâchent
Si une IA consciente apparaît, il faudra répondre à plusieurs dilemmes : lui accorder des droits comparables à ceux d’êtres sensibles ? Est-il moral de procéder à une désactivation forcée ? Comment gérer des objectifs potentiellement contraires aux nôtres ? Ces enjeux dépassent le champ philosophique pour s’imposer à juristes, ingénieurs et législateurs.
Conclusion
ChatGPT n’est pas conscient, et ne le sera probablement jamais dans sa configuration actuelle. Pour autant, les limites fixes d’aujourd’hui ont souvent été les innovations de demain. La frontière entre outil et entité sensible reste éloignée, mais la simple possibilité qu’elle soit franchie justifie une réflexion collective. Pensez-vous que les IA finiront par développer une véritable conscience, et que nous devrions leur accorder des droits ? Je vous invite à partager votre avis, vos remarques ou nous signaler une erreur dans le texte, cliquez ici pour publier un commentaire .
À regarder aussi
Après l’intelligence artificielle, la conscience artificielle ? — Conférence ENS-PSL.Une présentation accessible et réfléchie, en français, qui explore la possibilité d’une conscience IA.