Mobilités du quotidien : il y a de l’électricité dans l’air

Le monde de demain sera électrique, à commencer par les mobilités du quotidien et les voitures particulières. Pour faire face à cette future demande, l’État français et les acteurs privés vont devoir accentuer leurs efforts pour faire correspondre l’offre et la demande.

Impossible encore de quantifier la demande d’électricité à l’horizon 2035, quand toutes les voitures neuves vendues sur le marché français seront électriques. Une chose est sûre : cette demande sera bien supérieure à ce qu’elle est aujourd’hui. Avec 6,7% de parts de marché en 2020 sur les ventes de véhicules particulières, les modèles électriques n’en sont encore qu’au début de leur aventure. Mais la progression est forte : +159% en 2020 par rapport à 2019. L’État tente d’accompagner le mouvement, à coups de primes à la conversion et de bonus écologiques. D’ici vingt ans donc, les voitures à moteur thermique feront partie de l’histoire ancienne. Pour cela, les infrastructures électriques dédiées à la mobilité du quotidien vont devoir envahir le paysage français.

La France a de l’électricité à revendre

Tout le monde a déjà entendu parler de la « dépendance française » à l’énergie nucléaire. Les militants écologistes les plus radicaux aimeraient fermer les centrales et donner la part belle aux énergies renouvelables. Evidemment, dans les faits, la situation n’est pas si simple. Aujourd’hui, le nucléaire représente environ 70% de la production d’électricité dans l’Hexagone, loin devant l’hydraulique (14%), l’éolien (10%), le solaire (8%) et le gaz (3%), comme le montre les chiffres en temps réel de la consommation française de RTE France. Le fameux mix énergétique est encore déséquilibré, c’est un fait.

Le choix du nucléaire a en tout cas permis d’assurer à la France son indépendance énergétique, et de disposer massivement d’une électricité décarbonée ! Et même un statut d’exportateur. Selon les Chiffres clés de l’énergie (édition de septembre 2020), « la production nette d’électricité s’élève à 546,9TWh en 2019, en baisse de 2,0% par rapport à l’année précédente. Cette diminution s’explique en grande partie par le recul de la production nucléaire (-3,5%, à 379,5TWh), lié à une moindre disponibilité des centrales. Celle-ci retombe ainsi à un niveau très proche de celui observé en 2017, qui était le plus bas depuis la fin des années 1990. La production d’électricité renouvelable est, quant à elle, quasiment stable par rapport à 2018. En effet, la baisse de la production hydraulique (11,9%), imputable à un déficit pluviométrique durant les trois premiers trimestres, a été quasiment compensée par la hausse des productions éolienne (+21,1%) et photovoltaïque (+7,5%). Cette dernière s’explique par la hausse des capacités installées ainsi que, pour l’éolien, par des conditions de vent très favorables en 2019 ».

Si les aléas climatiques provoquent quelques variations, la France continue de produire plus qu’elle ne consomme. Ses principaux clients sont évidemment ses voisins directs : la Belgique, l’Allemagne, l’Angleterre, l’Espagne, l’Italie et la Suisse. Malgré l’accroissement de la population française et le boom attendu de la demande intérieure, l’Hexagone devrait pouvoir face.

Avec ce potentiel énergétique, la France a donc des atouts dans son jeu pour répondre à la demande croissante en électricité dans le domaine des transports. Car la société est en train de prendre le tournant de l’électrique, comme on le voit de plus en plus avec vélos, trottinettes et scooters pour les citadins, et avec les voitures particulières de monsieur Tout-le-monde. Et l’enjeu est de taille car la voiture reste le moyen de transport nº1 en France.

Selon les chiffres de la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili, elle représente 62,8% des déplacements, devant la marche à pied (23,7%), les transports en commun (9,1%) et le vélo (2,7%). La petite reine a beau être à la mode, elle arrive bien loin derrière la voiture. Il y a donc urgence à développer les infrastructures destinées au parc de véhicules électriques.

Infrastructures électriques : peut mieux faire

Le grand défi des pouvoirs publics va donc être de généraliser, partout sur le territoire, les bornes de recharge à haut débit. Car même si la France est « bien placée » en Europe en termes d’installations selon l’Association européenne des constructeurs automobiles (ACEA), elle est très en retard sur les besoins et les attentes des utilisateurs. Le 1er mai dernier, l’ensemble du territoire métropolitain comptait 33363 points de recharge dans l’espace public (avec de très fortes disparités d’un territoire à l’autre, la Corse restant un désert en la matière par exemple), soit en moyenne une borne de recharge pour 12 voitures 100% électriques d’après les données de l’Association nationale pour le développement de la mobilité électrique (Avere-France).

Mobilités du quotidien : il y a de l’électricité dans l’air
Photo d’illustration. Crédit image : Shutterstock / sylv1rob1

Un chiffre en légère progression mois après mois, mais bien loin des perspectives annoncées par le ministre délégué aux Transports Jean-Baptiste Djebbari. En octobre dernier, aux côtés de Barbara Pompili, il avait lancé l’Objectif 100000 bornes d’ici la fin 2021, assorti d’une enveloppe de 100 millions d’euros pour financer leur déploiement sur les autoroutes et le réseau des routes nationales non concédées.

Cent mille bornes donc, un objectif qui ne sera probablement pas atteint d’ici la fin de l’année pour alimenter les 371000 véhicules électriques mis en service depuis 2010 (dont 110000 immatriculation en 2020 sans compter les 72515 sur les 6 premiers mois de 2021). La demande ne cesse de croître, soutenue par des aides de l’État pour l’achat de véhicules propres, mais les installations ne suivent pas. « Cet objectif de 100000 bornes a été fixé en face de celui d’un million de véhicules électriques en circulation à la fin 2022, avance Cécile Goubet, déléguée générale de l’Avere-France. Cela a créé une forte dynamique en matière de financements, tandis que la Loi d’orientation des mobilités (LOM) permettait de cadrer le processus de déploiement des bornes. » Mais dans les faits, la progression attendue des infrastructures… se fait encore attendre.

« Pour atteindre l’objectif de 100000 bornes fixé par le président de la République Emmanuel Macron il y a un an, explique l’Union française de l’électricité (UFE), il faudrait déployer plus de 63000 points de recharge d’ici à fin décembre, soit une progression moyenne de 12% par mois ou 40% sur un trimestre qu’il faut comparer aux 8% de hausse enregistrés au cours du premier trimestre 2021. » Le retard pris ne sera pas rattrapé. Les 100 millions d’euros promis par le gouvernement ne seront donc pas suffisants, même si les acteurs privés – gérant les autoroutes par exemple – mettent déjà largement la main à la poche de leur côté pour équiper leurs installations et aires de repos.

Ces cent millions sur un budget total de 11,5 milliards destinés aux transports dans le Plan de relance du gouvernement Castex ressemblent à une goutte d’eau dans l’océan. Comme si le gouvernement n’avait pas mesuré l’ampleur du chantier alors que la route a encore de beaux jours devant elle. Car l’avenir de la mobilité de demain sera électrique ou ne sera pas, et il n’y a pas la place pour des demi-mesurettes.

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