Pour se débarrasser du frelon asiatique, les scientifiques « parlent sa langue »

Les insectes utilisent une sorte de langage pour communiquer entre eux, notamment lorsqu’il y a un danger. Pour les frelons géants du Nord, la sécrétion de phéromones est un moyen pour alerter les autres individus. Des scientifiques vont exploiter cette méthode pour essayer de les attirer et de les piéger.

Depuis que le premier frelon géant du Nord est apparu pour la première fois dans l’État de Washington en 2019, les autorités locales et celles de la Colombie-Britannique n’ont cessé d’essayer de l’éradiquer. Cette espèce est connue également sous l’appellation de « frelon meurtrier ». Afin de déjouer les plans du plus grand frelon du monde, des scientifiques originaires de Washington, du Japon et de la Corée du Sud ont élaboré une nouvelle technique qui utilise les méthodes de communication de ces insectes. Ce procédé consiste à guider les frelons géants vers des pièges en utilisant les phéromones produites par l’espèce.

Le langage des insectes

Tout comme la plupart des animaux, les insectes communiquent entre eux. Pour ce faire, ils utilisent différentes techniques telles que les sons aériens, les vibrations, la diffusion d’arômes chimiques ou encore les danses frétillantes. Par exemple, les abeilles asiatiques émettent des signaux d’alarme aigus appelés « piping signals » quand elles se sentent menacées par des frelons géants. Ces signaux sont pareils aux cris de peur ou de panique des primates et des oiseaux. D’autre part, les abeilles asiatiques sont aussi capables d’écouter les signaux d’alarme des frelons. Une étude effectuée par Heather Mattila, biologiste au sein du Wellesley College, et d’autres chercheurs a aussi révélé que les abeilles faisaient vibrer leur corps en le maintenant contre un objet solide pour amplifier leur alarme anti-prédateur.

Un frelon européen à gauche et un frelon asiatique à droite.
Un frelon européen à gauche et un frelon asiatique à droite. Photo d’illustration non contractuelle. Crédit : Shutterstock

Il s’agit d’une technique de communication rapide des abeilles pour organiser une défense collective contre les prédateurs de plus grande taille. Quant aux frelons, ils émettent des phéromones d’alarme pour signaler le danger aux autres individus. Les phéromones d’alarme et le venin du frelon sont secrétés par une glande qui se trouve prêt de son dard. À l’inverse des abeilles asiatiques, les abeilles européennes ne disposent pas de ce type de système de défense pour se protéger des prédateurs. Le problème est que cette espèce est indispensable pour polliniser les cultures dans la région nord-américaine.

Éradiquer les frelons géants du Nord avec leurs propres phéromones

Afin de protéger la frontière, se trouvant le long de l’État de Washington et la Colombie-Britannique, contre une invasion naissante de frelons géants, l’équipe de chercheurs veulent utiliser les propres phéromones de l’insecte pour le piéger. Les scientifiques testent quatre types d’appâts pour piéger les frelons géants. Si les deux premiers sont à base de composants et de phéromones d’alarme, le troisième émet une odeur d’abeille, tandis que le quatrième est un composé déjà connu pour attirer d’autres espèces de guêpes. Les phéromones constituent un des moyens de communication les plus efficaces pour les insectes. De ce fait, même un milliardième de gramme de cette substance peut convaincre un frelon d’attaquer.

Les scientifiques espèrent attirer des frelons qui se trouvent à plusieurs kilomètres de distance grâce à leurs appâts composés de phéromones d’alarme. Contrairement à l’appât recommandé, un mélange de vin de riz et de jus d’orange susceptible d’attirer plusieurs espèces d’insectes à la fois, les phéromones d’alarme sont plus sélectives, n’attirant que l’espèce cible. Plusieurs appâts ont été testés sur des sites du comté de Whatcom. Cependant, l’étude a révélé que les frelons géants à attirer n’étaient constitués que de très petit nombre. En fait, depuis que des entomologistes ont repéré et détruit trois nids de ces insectes près de Blaine, dans l’État de Washington en 2021, aucun individu n’a plus été signalé en Amérique du Nord.

Le cas du Japon et de la Corée du Sud

La situation est différente en Asie où les frelons géants du Nord sont présents presque partout, même dans les grandes villes comme Tokyo et Osaka, au Japon. Dans ce pays, l’espèce constitue un problème majeur pour les agriculteurs ainsi que pour les abeilles pollinisatrices. En effet, ces frelons sont capables de détruire une ruche entière en quelques minutes seulement. Par conséquent, beaucoup d’agriculteurs utilisent des pièges pour les tuer et les empêcher d’entrer dans les ruches. En Corée du Sud, environ cinq personnes par an sont tuées par des frelons géants et un nombre supérieur ou égal le sont par d’autres espèces de frelon ou de guêpe. Les frelons géants sont particulièrement dangereux pendant la période du Chuseok durant laquelle les Coréens nettoient les tombes de leurs ancêtres. Lorsque les gens tondent l’herbe, des vibrations sont émises aux nids de frelons géants qui se trouvent sous terre.

Selon cette étude, les frelons asiatiques ne mangeraient pas que des abeilles !
Les colonies de frelons asiatiques urbaines sont les plus redoutables pour les abeilles. Crédit photo : Shutterstock / IVAN VIEITO GARCIA

Cela alarme les insectes et les incite à chercher des ennemis à piquer. Les apiculteurs utilisent des frelons géants comme appâts et des raquettes de badminton pour les chasser. D’après les scientifiques japonais et coréens qui ont participé au test en Amérique du Nord, l’utilisation de la technique avec les phéromones ne ferait qu’aggraver la situation au Japon et en Corée. Selon eux, le frelon géant est l’un des principaux prédateurs de la chaîne alimentaire des insectes au Japon. De ce fait, les éradiquer pourrait augmenter l’effectif d’autres espèces de frelons. De même, en Corée, ils sont très communs et contribuent à la régulation et au contrôle du nombre de parasites au sein de l’écosystème.

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Source
kuow.org

Lydie RABE

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